Les neurones communiquent entre eux par des messagers chimiques, par exemple la sérotonine, la dopamine ou encore le glutamate. Les scientifiques ont longtemps pensé qu’à un neurone était associé un transmetteur principal. Un modèle qui vole peu à peu en éclats depuis les années 2000, date à laquelle des chercheurs de l’Inserm ont constaté que certains neurones pouvaient en fait secréter deux types de neurotransmetteurs. Ce double langage pourrait bien être impliqué dans de nombreuses pathologies neurologiques comme la dépression, l’anxiété, l’addiction ou encore la maladie de Parkinson.
Toutes les actions, les réflexions, les sensations qui marquent le quotidien sont autant de messages transmis de neurone en neurone grâce à des molécules chimiques appelées neurotransmetteurs. Le principal d’entre eux est le glutamate mais il en existe plusieurs autres, la dopamine, la sérotonine, l’acétylcholine, etc. impliqués dans des messages de nature différente. Jusqu’en 2000, les chercheurs pensaient qu’un neurone émettait un seul type de neurotransmetteur : les neurones sérotoninergiques de la sérotonine, les neurones dopaminergiques de la dopamine, etc. Pourtant ils découvrent à cette période la présence de transporteurs de glutamate à l’intérieur de neurones sérotoninergiques ou encore dopaminergiques. Ils en découvrent finalement sur de nombreux autres neurones connus pour utiliser d’autres transmetteurs que le glutamate. "Cela permet aux neurones d’adopter un double langage en libérant deux messagers différents, avec probablement un impact majeur sur la nature des informations transmises", estime Salah El Mestikawy, Unité Inserm 952.
Nouvel éclairage sur la dépression
Les chercheurs essaient maintenant de comprendre le rôle de ce double langage et notamment l’intérêt du glutamate pour des neurones ayant déjà un neurotransmetteur principal. Ils ont déjà constaté que la libération de cette substance par les neurones sérotoninergiques renforçait le message transmis par la sérotonine. En outre, le glutamate déclenche un signal rapide et précis alors que celui transmis par la sérotonine est plus lent et diffus. Les chercheurs s’intéressent de près aux neurones sérotoninergiques en raison de leur implication dans de nombreuses maladies neurologiques, dépression, anxiété ou encore schizophrénie. "Cette découverte récente doit changer notre vision et notre approche thérapeutique dans certaines pathologies comme la dépression, nous attribuons probablement à la sérotonine des propriétés qui appartiennent en fait au glutamate", suppose Salah El Mestikawy.
Cela pourrait bien être le cas pour de nombreuses autres pathologies. Les neurones cholinergiques impliqués dans la maladie de Parkinson et dans les addictions adoptent par exemple ce même double langage.
Salah El Mestikawy, Åsa Wallén-Mackenzie, Guillaume M. Fortin, Laurent Descarries and Louis-Eric Trudeau. From glutamate co-release to vesicular synergy: vesicular glutamate transporters. Nature Reviews Neuroscience, avril 2011, volume 12, numéro 4.
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