L’hypothèse de l’origine virale du diabète de type 1 a été au centre des débats lors du 48e congrès de l’Association européenne de l’étude
du diabète(EASD) qui s’est tenu du 1er au 5 octobre dernier à Berlin.
Lors d’une session présentée au congrès de l’EASD-2012, le Pr Heikki Hyöty (professeur de biomédecine et de virologie, Ecole de médecine, Université de Tampere, Finlande) est revenu sur plusieurs publications récentes qui relancent l’hypothèse d’une origine virale du diabète de type 1 et celle d’une possible vaccination.
L’augmentation de l’incidence du diabète de type 1 au cours des dernières décennies indique que des facteurs environnementaux jouent un rôle important dans le développement de la maladie. A ce titre, l’infection virale pourrait expliquer l’augmentation de l’incidence du diabète de type 1, mais aussi la variation d’incidence entre les pays et la variation saisonnière.
«Les virus comptent parmi les principaux suspects, car ils sont plusieurs à pouvoir induire un diabète chez l’animal en détruisant les cellules bêta du pancréas. Aussi, certains entérovirus ont été associés au diabète de type 1 chez l’homme ; en particulier, le sous-groupe des entérovirus coxsackie-B (CVB)», a indiqué le Pr Hyöty avant de rappeler que déjà, en 1969, Gamble et Coll ont montré pour la première fois que des anticorps anti-CVB étaient plus fréquemment retrouvés chez les diabétiques de type 1 que chez les sujets contrôlés. Cette observation a ensuite été confirmée par plusieurs études séro-épidémiologiques. «Aussi, depuis les années 1980, quelques cas d’infections à entérovirus fatales avec diabète aigu ont été rapportés dans la littérature. Les nécropsies pancréatiques de ces patients ont mis en évidence des nécroses et la présence d’entérovirus de type coxsackie B4 dans les îlots pancréatiques mais pas au niveau du tissu pancréatique exocrine», a-t-il ajouté.
Il fait donc référence aux entérovirus qui infectent couramment les jeunes enfants et qui sont habituellement à l’origine d’infections bénignes voire asymptomatiques. «Cependant, occasionnellement, le virus se propage au myocarde ou au système nerveux central et provoque des myocardites, des encéphalites ou des paralysies. Les plus connus des entérovirus sont les 3 types de poliovirus responsables de la poliomyélite», a-t-il encore souligné. Pour le Pr Heikki Hyöty, l’association entre entérovirus et diabète de type 1 est confirmée par des travaux récents en faisant référence à une étude publiée dans le British Medical Journal, l’année dernière, qui a corrigé les données de 26 études cas-contrôle et a montré qu’il existait une association significative entre l’infection par entérovirus détectée par des méthodes moléculaires et le diabète de type 1 : «Il y a 9,77 fois plus de sérologies positives au coxsackie chez les diabétiques de type 1 et 3,74 fois plus de sérologies positives dans le pré-diabète», a t-il rappelé.
Le Pr Noel Morgan (Peninsula Medical School, Plymouth, Royaume-Uni) a présenté les résultats des travaux de son équipe, qui a recherché la présence d’entérovirus dans des nécropsies pancréatiques d’enfants diabétiques de type 1. «Des protéines de virus ont été détectées dans près de 80% des cellules bêta restantes des échantillons de pancréas des diabétiques de type 1 (immunoréactivité pour la protéine vp1). En revanche, seulement 30% des cellules bêta des pancréas des enfants non diabétiques étaient infectées.»
«Les protéines virales n’ont pas été détectées ailleurs que dans les îlots. En outre, il y avait une forte présomption de l’infection au niveau des îlots chez 44 des 72 enfants atteints de diabète de type 1 (61%) et une faible présomption d’infection chez 3 des 50 témoins appariés pour l’âge», a-t-il rapporté. Au vu de ces résultats, les chercheurs ont testé l’hypothèse selon laquelle l’infection entérovirale pourrait précipiter une auto-immunité contre les cellules bêta et induire un diabète de type 1. Les prochaines années montreront si ces efforts ont mené à une percée médicale et si le développement d’un vaccin efficace et bien toléré est possible. «Mais, même dans le meilleur scénario, cela prendra des années», a conclu le Pr Hyöty.
Djamila Kourta
El watan du 28 octobre 2012