Le président du Syndicat national des pharmacies d'officine (Snapo) n'a pas caché son étonnement sur les prévisions faites par des opérateurs pharmaceutiques qui annoncent une forte pénurie de médicaments en Algérie durant l'année 2011.
«C'est bon de faire des études, mais à condition de les rendre publiques et d'informer les acteurs du secteur sur les critères et les éléments de base retenus pour arriver à de telles conclusions», a indiqué Messaoud Belembri, président du Snapo, qui estime qu'«il est vraiment difficile d'avoir une idée aussi précise de ce que sera, dans une année, la situation au niveau du marché du médicament.
Poussant la réflexion plus loin, notre interlocuteur s'interroge si cette étude a été faite au nom des opérateurs ou bien au nom des importateurs.
«La situation diffère pour les uns et les autres, chacun ayant son statut dans le processus de la mise des médicaments sur le marché. C'est un domaine où les intérêts se confondent très souvent», a-t-il ajouté. Pour étayer ses arguments,
M. Belembri explique que le gouvernement n'a pris aucune mesure objective qui peut provoquer et surtout pénaliser le marché. «A ma connaissance, les pouvoirs publics n'ont pas décidé de mesures de restrictions budgétaires pour la fabrication ou l'importation des médicaments.
Bien au contraire, les opérateurs ont été sollicités pour enrichir et élargir leurs gammes de production de façon à satisfaire la demande locale», a-t-il expliqué. «La diffusion de ce genre d'information vise-t-elle à affoler la population où à exercer des pressions sur le gouvernement afin de le pousser à revenir sur les nouvelles mesures prises pour réorganiser le secteur ?», s'est-il interrogé.
«Les producteurs doivent assumer leurs responsabilités»
A propos de la diffusion de la troisième liste de médicaments interdits à l'importation, le président du Snapo souligne qu'elle est minime et insignifiante par rapport aux deux listes préparées auparavant. «C'est une liste qui contient un peu plus de 100 médicaments,
mais c'est négligeable par rapport aux autres listes où le nombre de médicaments prohibés est beaucoup plus important», a-t-il souligné.
Il a tenu à rappeler que, contrairement aux deux fois précédentes, le ministre a réuni tous les opérateurs du secteur qu'ils soient fabricants, importateurs ou syndicat, pour engager un débat sur le contenu de cette liste et donner leur avis.
«Il y a eu une grande concertation avant que la liste soit avalisée par le ministère», a-t-il précisé. Tout en soulignant que le Snapo a toujours été favorable aux décisions qui encouragent la production locale de médicaments, M. Belembri rappelle la lourde responsabilité des producteurs locaux dans tous les problèmes qui pourraient surgir dans le secteur. «Les opérateurs doivent respecter leurs engagements, ils sont tenus de produire tous les médicaments interdits à l'importation, et en quantité suffisante, comme cela a été convenu.
La plus petite des défaillances dans ce processus peut entraîner beaucoup de problèmes dans l'approvisionnement du marché.
S'ils voient qu'ils ne sont pas capables de satisfaire ce contrat et assurer la disponibilité des médicaments, ils n'avaient qu'à exprimer leurs insuffisances et définir avec précision les quantités qu'ils peuvent produire. Comme ça, on ne va pas tomber dans des situations de crise et obliger les pouvoirs publics à importer des médicaments en extrême urgence», a-t-il encore expliqué.
M. Belembri estime que le principe d'interdire l'importation des médicaments ne pose pas problème en lui-même. «Il s'agit d'interdire de façon réfléchie et rationnelle sans créer des crises et provoquer des pénuries tel que constaté pour certains produits.
En contrepartie, il faut être capable d'y faire face en palliant tout manque qui pourrait surgir en mettant en place un dispositif d'urgence opérationnel au cas où une unité de production rencontrerait un problème», a-t-il encore suggéré.
Fortes pressions sur le marché
Tout en soulignant l'inexistence de chiffres précis sur la production nationale, notre interlocuteur reconnaît que le marché connaît actuellement beaucoup de perturbations en matière d'approvisionnement en médicaments.
«Cela ne se limite pas aux médicaments importés uniquement, mais ça s'applique aussi aux médicaments produits localement.
Il y a une pression terrible sur le marché actuellement, qui provoque ces petites pénuries. Cela est visible depuis la mise en application des décisions visant à réorganiser le secteur et à limiter l'importation. C'est de plus en plus récurrent», a-t-il expliqué, estimant que ces pénuries visent «à faire des pressions sur le gouvernement afin de le mener à revenir sur certaines décisions qui sont des signes forts d'une indépendance dans la gestion», a-t-il conclu.
N. B
Le temps du 28/11/2010