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 Ces gènes qui façonnent la forme des animaux

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MessageSujet: Ces gènes qui façonnent la forme des animaux   Ces gènes qui façonnent la forme des animaux Icon_minitimeJeu 10 Déc - 0:25

Les récentes avancées de la génétique du développement permettent de comprendre les mécanismes cellulaires et moléculaires qui déterminent la structuration des embryons et donc la forme des espèces vivantes.
L'étude de ces mécanismes révèle le caractère modulaire des régulations qui s'exercent sur les gènes et les protéines impliqués dans la mise en place des structures de l'organisme en développement.
C'est grâce à cette modularité que le développement embryonnaire peut évoluer et engendrer la diversification des formes vivantes. Elle autorise que les mutations affectant l'expression des gènes ou la fonction des protéines ne soient pas nécessairement fatales à l'embryon et sa descendance possible, mais plutôt, elle assure une nouvelle cohérence au développement embryonnaire.
La cohérence maintenue en dépit des changements survenus dans les gènes qui contrôlent le développement définissent la plasticité nécessaire à la vie et à son évolution.


De la première cellule à l'obtention d'un organisme différencié dans les trois dimensions de l'espace



La question centrale qu'aborde la biologie du développement consiste à comprendre comment au départ d'une cellule unique, indifférenciée, issue de la rencontre de deux gamètes, un organisme structuré dans les trois dimensions de l'espace est obtenu au terme des divisions et différenciations cellulaires prenant cours lors de l'embryogenèse et de la morphogenèse.
En effet, pour se restreindre au monde animal, les phénomènes à l'œuvre au cours du développement embryonnaire organiseront l'organisme selon son axe antéro-postérieur (axe bouche-anus), son axe dorso-ventral, et son axe bilatéral (gauche-droite). On reconnaîtra ainsi le long de l'axe antéro-postérieur d'un vertébré, comme l'homme, la souris, les poissons ou le serpent, un système nerveux central régionalisé, avec le cerveau au niveau de la tête, suivi du tronc cérébral et de la moelle épinière. Différents centres nerveux, différentes populations de neurones, différents nerfs s'individualisent selon leur position sur l'axe du système nerveux
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La structuration spatiale de l'organisme est reproductible génération après génération. Elle est sous contrôle génétique. La maman souris ressemble à ses petits.
©️ Olivier De Backer, UCL


Ainsi verra-t-on par exemple chez nous douze paires de nerfs crâniens qui émanent de la base du cerveau et du tronc cérébral, et qui établissent la connexion entre différents organes et les centres nerveux qui les contrôlent pour assurer par exemple la déglutition ou la respiration. De manière similaire, la colonne vertébrale se développe comme une succession de vertèbres faisant suite au crâne, et dont la forme diffère selon la position sur l'axe principal de l'organisme.
Chez les mammifères, la première vertèbre cervicale, l'atlas qui porte le crâne, adopte une morphologie clairement distincte de la seconde, l'axis, elle-même de forme différente des vertèbres cervicales qui lui font suite, et encore des vertèbres thoraciques qui portent les paires de côtes, et ainsi de suite. Cette structuration spatiale de l'organisme est mise en oeuvre progressivement au cours du temps du développement embryonnaire. Il y a donc un couplage entre le temps et l'espace du développement de l'embryon. Cette structuration de l'espace dans le temps est reproductible et héritée, puisqu'elle définit, au terme de l'embryogenèse, les traits propres aux espèces animales. Deux chats se ressemblent, et se distinguent clairement de deux souris. Elle est donc sous contrôle génétique.


Homeosis


Les programmes génétiques qui assurent la structuration de l'organisme commencent à être identifiés et, pour certains, on commence à entrevoir les mécanismes de régulation des gènes qui la coordonnent et la contrôlentCes gènes qui façonnent la forme des animaux Rezso_12

La code homéotique préside à la structuration des organismes vertébrés… et invertébrés ©️ 1994 Lydia Kibiuk

A la fin du XIXe siècle, le naturaliste William Bateson rapportait ses observations de mouches portant des structures morphologiquement bien développées, mais disposées à des endroits anormaux sur le corps de l'animal. Il existe par exemple des mouches mutantes portant des pattes en lieu et place des antennes, ou arborant une deuxième paire d'ailes au niveau d'un segment du thorax normalement affublé de petits balanciers. Ce phénomène qu'il baptisa homeosis, fut redécouvert et interprété une petite centaine d'années plus tard, à la lumière des progrès de la génétique moléculaire et de son étude appliquée à l'embryologie. C'est ainsi qu'il fut identifié que les transformations homéotiques chez la drosophile trouvent leur origine dans la dérégulation de gènes appartenant à une famille de gènes, logiquement dénommés gènes homéotiques (ou gènes Hox), qui président à la destinée des structures en développement selon leur position le long de l'axe antéro-postérieur de l'organisme.
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Transformation morphologique de la seconde vertèbre (C2) conséquente à la modification d'un gène homéotique
©️ Sophie Remacle, Leila Abbas, René Rezsohazy, UCL



En d'autres termes, ces gènes homéotiques agissent comme des architectes contrôlant la structuration spatiale de l'organisme. Des gènes homéotiques ont ensuite été identifiés à travers presque tout le règne animal, y compris chez l'homme ou la souris qui en possèdent trente neuf, et leur étude a révélé qu'ils contribuent chez toutes les espèces à l'établissement d'un axe antéro-postérieur bien régionalisé.
Par exemple, l'inactivation expérimentale d'un gène homéotique donné chez la souris a conduit à transformer la deuxième vertèbre cervicale, l'axis, en une vertèbre possédant la morphologie de l'atlas. L'invalidation d'un autre gène de la famille a provoqué l'apparition d'une paire de côtes supplémentaire connectée à une vertèbre lombaire qui en est normalement dépourvue. Leur rôle ne se limite cependant pas à la régionalisation du grand axe de l'organisme, car selon les espèces, ces gènes participent aussi par exemple au développement des membres, à la différenciation des lignées cellulaires du sang, à la maturation de la glande mammaire en vue de la lactation ou encore à la croissance des poils.

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Squelette d'une souris ©️ Françoise Gofflot, Natalia Cabrera, UCL

Les gènes homéotiques codent pour des protéines qui ont pour rôle de contrôler l'expression d'autres gènes. On parle de facteurs de transcription puisqu'ils stimulent ou inhibent la transcription de gènes en ARN qui seront ensuite traduits en protéines. Même si les gènes contrôlés par ces facteurs de transcription Hox restent à ce jour largement inconnus, on sait que ces gènes cibles assurent des fonctions très diverses dans la communication entre les cellules, leur division, leur migration, leur métabolisme, toutes fonctions nécessaires à la bonne différenciation des structures en développement, qu'il s'agisse de vertèbres ou de nerfs crâniens par exemple. Autrement dit, les protéines encodées par les gènes homéotiques sont des maîtres architectes en ce sens qu'elles contrôlent et articulent le développement de structures dans le temps et dans l'espace .
Mais comment cette structuration s'opère-t-elle, assurant le développement des bonnes structures aux bonnes places et en bon ordre ?

Les gènes homéotiques instruisent le devenir de nombreuses structures en développement


Les trente neuf gènes Hox des mammifères sont répartis en quatre complexes de gènes localisés sur quatre chromosomes différents (pour revue voir Favier et Dollé, 1997).
Une relation particulière lie l'ordre physique, linéaire, des gènes homéotiques au sein des complexes chromosomiques, la localisation des territoires embryonnaires qui les expriment et la temporalité de leur expression. Ainsi, les gènes occupant les premières positions au sein de leurs complexes respectifs sont ceux qui sont exprimés le plus précocement au cours du développement embryonnaire et qui s'expriment dans les structures les plus antérieures. Les gènes suivants commencent à s'exprimer légèrement plus tardivement que les précédents et montrent dès lors une frontière d'expression plus postérieure au sein de l'embryon. Et ainsi de suite. Les derniers gènes dans l'ordre linéaire des complexes chromosomiques sont ainsi ceux dont l'expression démarre le plus tard et dont la frontière d'expression est la plus retirée sur l'axe antéro-postérieur de l'embryon.
Même si cette règle de colinéarité qui relie l'ordre des gènes à l'extension spatio-temporelle de leur expression souffre de nombreuses exceptions étant donné que l'expression des gènes est en réalité plus dynamique, on peut cependant considérer qu'une cellule donnée exprimera une combinaison de gènes homéotiques propre à sa position sur l'axe antéro-postérieur de l'embryon. Une cellule plus proche de la tête n'exprimera en effet qu'un petit nombre de gènes Hox, alors qu'une cellule qui se trouve plus proche de l'anus exprimera un plus grand nombre de gènes. Autrement dit, la combinaison des gènes homéotiques exprimés dans une cellule la renseigne sur sa position sur le grand axe de l'embryon et y contrôle un programme génétique adéquat à cette position. Il s'établit donc un code résultant de la combinaison de gènes exprimés et qui préside à la destinée des cellules
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Variations sur le thème des vertèbres…©️ Schafer, E.A., Symington, J. and T.H. Bryce, Eds. Quain's Anatomy, 11th Ed., vol. IV, Pt. I: Osteology and Arthrology. Longman, Green, and Co., London, 1915.


Il apparaît donc que la structuration spatiale de l'organisme repose sur ce code combinatoire homéotique, c'est à dire sur le bon décours spatio-temporel de l'expression des gènes homéotiques. Si l'on perturbe expérimentalement ce code chez la souris par exemple, on affecte le devenir des structures en développement qui adoptent la destinée qui est dictée par la combinaison de gènes exprimés imposée par l'expérience.
Par exemple, la première vertèbre cervicale, l'atlas, n'exprime pas le gène Hoxb4, alors que l'axis, qui lui est juste postérieur, l'exprime. Suite à l'inactivation expérimentale d'Hoxb4, l'axis adopte une destinée similaire à l'atlas, puisqu'en l'absence du gène Hoxb4, cette vertèbre exprime une combinaison de gènes homéotiques qui spécifie la nature de l'atlas (Ramirez-Solis et al., 1993). De manière remarquable, si l'initiation de l'expression d'un gène homéotique est différée dans le temps on assiste à un recul spatial de certaines structures. Par exemple, si le gène Hoxd11est exprimé avec quelques heures de retard par rapport à la normale, la ceinture pelvienne sur laquelle s'articule les membres postérieurs et qui prend appui sur la colonne vertébrale recule d'une vertèbre : les pattes arrière se retrouvent donc un peu plus vers l'arrière


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Code homéotique : un schéma de la colonne vertébrale est représenté en parallèle de rectangles colorés figurant l'étendue de l'expression de gènes Hox
©️ Sophie Remacle, UCL



L'expression des gènes, et donc notamment des gènes homéotiques, est régulée par des facteurs de transcription. Ces facteurs reconnaissent et contactent de courtes séquences spécifiques d'ADN aux abords des gènes qu'ils contrôlent. Un gène donné peut ainsi se trouver sous l'influence de plusieurs exemplaires d'une même séquence reconnue par le même facteur de transcription ou sous l'influence de séquences reconnues par différents facteurs.
Généralement ces séquences qui constituent des modules de contrôle de l'expression du gène sont nombreuses et c'est leur action combinée qui, suite à l'interaction physique avec les facteurs de transcription qui les reconnaissent, assure le contrôle global et dynamique de l'expression génique au cours du temps et dans les différentes lignées cellulaires de l'organisme en développement. La nature modulaire de ces séquences de contrôle est manifeste dès lors qu'on peut en supprimer ou en ajouter dans le voisinage d'un gène qui voit ainsi son expression modifiée dans l'espace et dans le temps.


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La double hélice d'ADN est reconnue par des protéines qui s'assemblent en un complexe pour stimuler l'expression des gènes…©️ L. Wolpert et al. eds

Dans l'exemple présenté plus haut concernant Hoxd11, il s'agit précisément d'une situation où un module de régulation, donc une courte séquence d'ADN, a été modifiée dans le voisinage de Hoxd11, de sorte qu'une composante du contrôle spatial et temporel du gène a été perdue. En conséquence le gène s'allume plus tard. Ces modules intègrent donc quantité d'informations renseignant chaque cellule sur son environnement, ses cellules voisines, sa position dans l'espace. Le profil spatial et temporel d'expression des gènes Hox et la colinéarité reliant l'ordre de ces gènes sur les chromosomes à leur profil d'expression doivent trouver leur explication dans les modules de régulation qui assurent leur contrôle.
De nombreux régulateurs de l'expression des gènes Hox ont été découverts qui permettent au moins partiellement de rendre compte de leurs profils spatio-temporels d'expression.
Par exemple, certaines molécules diffusibles, comme l'acide rétinoïque qui dérive de la vitamine A ou certains facteurs de croissance, se distribueraient selon un gradient de concentration antéro-postérieur au voisinage de certains organes en développement comme le cerveau (Shimeld, 1996). Ces facteurs de croissance influencent l'activité de facteurs de transcription qui activent alors de manière dose-dependante les gènes Hox qui sont leurs cibles. A une concentration donnée du facteur de croissance, correspondant à une localisation donnée sur l'axe antéro-postérieur de l'embryon, le gène cible ne sera pas activé, alors qu'à une concentration légèrement supérieure, donc en un territoire par exemple plus postérieur, il le sera.

A la source de l'organisation spatiale de l'embryon



Mais si de tels gradients préfigurent l'axe antéro-postérieur de l'embryon, quelles en sont les causes ? Ces mécanismes de régulation des gènes homéotiques qui permettent d'allumer les gènes de manière ordonnée dans le temps et le long de l'axe antéro-postérieur de l'embryon, impliquent qu'une information de position est déjà conférée aux régulateurs des gènes homéotiques...
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Représentation schématique des transformations vertébrales obtenues suite à l'inactivation de différents gènes conduisant à une perturbation du code homéotique
©️ René Rezsohazy, UCL



On ne fait que remonter dans la hiérarchie des régulateurs, sans trouver l'origine première des axes de l'embryon... Quelle est la source première qui organise l'embryon dans les trois dimensions de l'espace ? Pour de nombreux animaux dont le développement embryonnaire n'est pas placentaire, on retrouve les premières asymétries avant même la fécondation, au niveau de l'œuf dont le cytoplasme contient des protéines et des ARN dont la distribution n'est pas homogène mais bien polarisée. Chez la mouche, certaines protéines présentent une distribution qui préfigure déjà les futurs axes de l'embryon. Cette distribution est dictée par le dialogue que l'œuf en maturation établit avec des cellules nourricières voisines. Donc, les axes embryonnaires trouvent leur origine dans l'ovogenèse. Chez la grenouille, il en va presque de même. L'œuf présente également un cytoplasme non homogène, mais celui-ci ne préfigure pas exactement un axe embryonnaire. Ce n'est qu'au moment de la fécondation que le cytoplasme de l'œuf devenu embryon unicellulaire est réarrangé. Ce réarrangement est en partie guidé par la gravitation universelle qui agit sur le cytoplasme cellulaire dont la densité physique n'est pas homogène. Si après la fécondation, l'œuf réarrangé est placé dans une centrifugeuse de sorte à exercer une force qui contrecarre le mouvement tout juste opéré sous l'effet de la gravitation, on obtient des embryons à deux têtes et qui portent deux colonnes vertébrales (Black et Gerhart, 1985). Chez le poulet, la rotation de l'œuf dans les conduits génitaux de la femelle procure également à la gravitation un rôle important pour la définition du grand axe de l'embryon qui s'y développe et qui s'oriente selon le champ gravitationnel. Chez les mammifères en revanche, les premières divisions cellulaires qui suivent la fécondation engendrent des cellules qui gardent chacune le potentiel de générer un embryon entier
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Ce n'est que plus tard que les potentialités développementales des cellules se restreignent. En particulier, il est notable qu'une partie seulement de la grappe de cellules obtenue au tout début du développement donnera l'embryon proprement dit, le reste contribuant aux annexes comme le sac amniotique ou le placenta. L'origine des axes embryonnaires et de l'axe antéro-postérieur en particulier demeure mal connue chez les mammifères.
Quoiqu'il en soit, les asymétries cruciales qui s'établissent très précocement dans l'œuf ou l'embryon sont relayées, raffinées, transformées, jusqu'à instruire les gènes homéotiques qui président à la destinée de segments de l'organisme le long de son axe antéro-postérieur. Ces relais sont bien connus chez la mouche ou la grenouille. Ils le sont moins chez l'homme ou la souris.



Les gènes du développement et l'évolution des formes animales


Les perturbations que l'on peut produire expérimentalement au niveau de l'expression de gènes qui œuvrent à structurer l'embryon entraînent la transformation de territoires embryonnaires et donc celle du corps adulte.

On l'a évoqué, il s'agit par exemple de l'apparition de côtes supplémentaires, de la transformation morphologique de vertèbres ou du recul du point d'ancrage des membres postérieurs. Ces perturbations peuvent être occasionnées en particulier par des mutations dans les modules de régulation qui assurent l'extension spatio-temporelle de l'expression des gènes homéotiques. En réalité, il semble bien que c'est ainsi que, parmi d'autres voies, la diversification des formes animales s'est opérée au cours de l'évolution. Un exemple particulièrement éloquent apparaît avec les serpents. Chez les serpents comme les boas, les combinaisons de gènes homéotiques qui chez la souris s'expriment au niveau des futures vertèbres thoraciques, s'expriment presque tout le long de la future colonne vertébrale (Cohn et Tickle, 1999).
En d'autres termes, presque toutes les vertèbres portent des côtes. En revanche, on ne voit pas apparaître de membres antérieurs, et alors que certains serpents portent encore de rudimentaires ébauches de pattes postérieures, d'autres en sont également complètement dépourvus.


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On assiste depuis une dizaine d'années à un foisonnement d'exemples similaires illustrant comment la modification des profils d'expression de gènes contrôlant certaines étapes du développement embryonnaire affecte le devenir ou la localisation de structures comme les membres, les vertèbres, les organes, ... Or l'établissement de ces profils est le fruit de l'intégration de contrôles agissant sur l'expression des gènes par le jeu des multiples modules de régulation. Ces modules peuvent évoluer, changer ou disparaître, sans que tout le programme développemental de l'animal ne soit ipso facto désorganisé. De tels changements sont donc compatibles avec une nouvelle intégrité de l'organisme dont la structuration spatiale peut être modifiée. Lorsque ces changements sont maintenus et transmis à la descendance, c'est la forme de l'espèce animale qui évolue.
On aura compris que les mécanismes qui régulent la structuration spatiale des embryons, et sur lesquels l'évolution agit pour entraîner la diversification des formes, présentent une grande plasticité. Cette plasticité peut être définie comme une capacité à accuser des mutations, donc d'être déformable, tout en conservant une cohérence. Déformabilité et cohérence, comme conditions nécessaires à l'évolution adaptative des formes vivantes qui sont aux prises et en interaction continue avec un environnement changeant. La déformabilité et la cohérence sont liées. Elles sont assurées par le caractère modulaire des constituants. Il s'agit par exemple de nombreux modules de transcription qui ensemble informent le gène sur « où » et « quand » il doit être exprimé. Supprimer un module, n'affecte pas nécessairement tout le profil d'expression du gène et ne perturbe pas globalement sa fonction.
On l'a vu, la perte d'un module de transcription peut par exemple retarder l'expression d'un gène qui reste cependant fonctionnel, avec pour conséquence un changement dans l'organisation du corps.


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Variations sur le thème du membre antérieur ©️ Campbell, Reese, & Mitchell "Biology

La cohérence et la déformabilité des formes vivantes, assises sur la modularité des contrôles, s'appuient aussi sur leur multiplicité. En réalité l'activité des gènes, des protéines et plus largement des fonctions biologiques sont le siège de multiples régulations qui s'intègrent pour entraîner une réponse appropriée aux variations du milieu, qu'il s'agisse de la présence de molécules particulières dans le milieu extracellulaire, de variations dans les communications de cellule à cellule, de changements dans l'environnement de l'individu, etc... L'intégration des fonctions à l'échelle du gène, de la protéine, de la cellule ou de l'organisme entier s'opère par de nombreuses influences croisées et des contrôles en retour.
C'est ainsi que certaines protéines qui contrôlent respectivement la destinée antérieure ou postérieure de territoires embryonnaires exercent sur leurs gènes respectifs des contrôles croisés. Si l'activité d'une protéine contribuant à diriger la destinée antérieure était accrue soudainement, par exemple suite à une différence de température du milieu où se développe l'embryon, l'étendue du territoire qui adopterait une identité antérieure serait élargie. Cependant, en vertu des régulations croisées s'opérant entre les gènes contrôlant l'identité des territoires embryonnaires selon leur position, l'accroissement d'activité de la protéine se répercute sur l'expression de gènes contribuant à la destinée postérieure. En retour, ces derniers vont réprimer l'expression des gènes assurant la destinée antérieure.
Cette répression exercée sur l'expression génique compense ainsi l'accroissement initial d'activité de la protéine. Ainsi, les variations d'activité d'une protéine et les variations d'expression d'un gène sont contrebalancées par les activités compensatoires des gènes et protéines qui les contrôlent en retour.
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